Par M. Amadou KEITA
Expert en stratégie géopolitique, défense et sécurité des territoires
Président du Mouvement pour la Renaissance Nationale Rep Guinée

Depuis quelques jours, l’attention du monde est à nouveau captée par une escalade militaire entre Israël et l’Iran. À première vue, il pourrait sembler qu’il ne s’agit que d’un nouvel épisode dans le dossier, certes préoccupant, du nucléaire iranien. Mais en réalité, ce conflit s’inscrit dans une toile géopolitique bien plus large, plus ancienne, et surtout plus stratégique qu’on ne le croit.
En tant qu’analyste de terrain, je me sens interpellé. Pas seulement par le fracas des armes, mais par les silences diplomatiques qui l’entourent. Car ce qui se joue ici dépasse la seule confrontation israélo-iranienne. C’est tout l’équilibre du Moyen-Orient qui est en train d’être redéfini, au rythme des intérêts transversaux, des coalitions invisibles, et de la lutte acharnée pour le contrôle des zones d’influence.
J’écris ces lignes avec gravité, mais aussi avec l’expérience de plusieurs années d’observation stratégique, en Afrique comme à l’international. Et je suis convaincu d’une chose : la France, si elle veut être utile, doit sortir des automatismes et reprendre sa voix propre.
Trop souvent, elle s’aligne sur les positions dictées par l’OTAN ou l’Union européenne. Ce fut le cas en Afrique, où ses réactions face aux pays du Sahel, notamment ceux de l’Alliance des États du Sahel (AES), ont manqué de discernement. Ce fut aussi le cas dans le conflit entre la Russie et l’Ukraine, où une diplomatie d’écoute aurait été préférable à une diplomatie de bloc.
Je ne dis pas cela avec arrogance. Je dis cela avec la conviction que la paix ne se construit pas en choisissant ses interlocuteurs selon les alliances du moment, mais en parlant à tout le monde, même à ceux avec qui l’on n’est pas d’accord. Oui, y compris à la Russie, qui reste un acteur incontournable dans la région.
La France a, dans son histoire, incarné une voix différente. Une voix d’équilibre, de nuance, de sagesse. Ce rôle, peut le retrouver, mais à condition de ne pas céder à la pression des blocs ou aux réflexes militaires.
Cette tribune n’est pas seulement une analyse. C’est aussi un appel.
Un appel à la lucidité pour la France, mais aussi un appel à la reconnaissance de l’expertise africaine. Car dans ces domaines sensibles de sécurité et de géopolitique, l’Afrique a ses propres penseurs, ses propres stratèges, enracinés dans leurs contextes, au fait des réalités locales et capables de contribuer à la stabilité du monde.
Je le dis avec humilité mais aussi avec responsabilité : la République de Guinée, comme bien d’autres nations africaines, gagnerait à faire confiance à ses propres ressources intellectuelles et stratégiques. Nous avons les compétences, la clairvoyance, et le recul nécessaires pour comprendre le monde et proposer des voies de paix adaptées à nos territoires.
Ce que je propose ici n’est pas une leçon donnée, mais une main tendue. Pour que la parole africaine en matière de défense, de sécurité et de diplomatie cesse d’être marginalisée, et qu’elle devienne un levier actif dans la construction d’un monde multipolaire et apaisé.
M. Amadou KEITA
Expert indépendant en stratégie géopolitique, défense et sécurité des territoires
Président du Mouvement pour la Renaissance Nationale Republique de Guinée
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