The DIVI future theme ?

Les conditions de détention de Mohamed Bazoum se dégradent tandis que se poursuit la traque des personnalités politiques du régime déchu.

A Niamey, les caciques du régime renversé par le coup d’Etat du 26 juillet se sont volatilisés. Beaucoup ont fui la capitale et les rives du fleuve Niger dans les jours qui ont suivi le putsch du général Abdourahamane Tiani. Ceux qui restent se disent traqués par la junte, qui détient toujours en otage le président Mohamed Bazoum, sa femme et son fils de 22 ans. Plusieurs sources nigériennes et diplomatiques évoquent l’existence d’une liste de « cibles » de personnalités proches des autorités renversées ou membres du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS), la formation politique au pouvoir avant le pronunciamiento.

Une certaine psychose s’est installée dans les rangs de l’ancienne majorité à Niamey, depuis la vague d’arrestations qui a suivi le putsch. Au moins huit ministres, conseillers et cadres du PNDS ont déjà été arrêtés par le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie. Ils restent depuis gardés par la junte, quelque part dans la capitale. Mercredi 9 août, le fils d’Aichatou Boulama Kané, l’ambassadrice du Niger à Paris révoquée par les putschistes, a été mis aux arrêts.

Le Monde a pu contacter à Niamey un de ces cadres du régime déchu, qui, sous couvert d’anonymat, alerte sur les conditions de détention de « Son Excellence Bazoum » qui ne cessent de se dégrader. « Il n’a plus d’électricité, le groupe électrogène de secours a aussi été coupé », glisse-t-il. A cause de cette coupure de courant, intervenue, selon un autre membre de son entourage, en réponse aux sanctions imposées le 30 juillet par la Cedeao pour tenter de faire plier la junte, les denrées dont le président disposait seraient toutes périmées. Les ravitaillements tolérés par ses geôliers les premiers jours auraient depuis été empêchés.

« Il tiendra »

« Il n’a plus de nourriture fraîche, que des stocks de céréales et du riz. Il a aussi un stock d’eau minérale qu’il rationne, dans cette maison barricadée transformée en prison. Mais il tiendra. C’est un militant, qui a commencé son combat politique sur les bancs du lycée. Il est très armé politiquement », souligne Rhissa Ag Boula, ministre et conseiller des présidents Mahamadou Issoufou et Mohamed Bazoum, rencontré à Paris vendredi 11 août.

Cet ex-chef rebelle touareg, qui a participé aux rébellions qui ont agité le nord du Niger au début des années 1990 et 2000, a annoncé la création mercredi d’un Conseil de la résistance pour la République pour appeler à l’arrestation du chef des putschistes et à la libération du président. Un appel pour l’heure resté vain.

Le président Bazoum lui-même aurait déclaré à Human Rights Watch, entre mercredi et jeudi, n’avoir eu « aucun contact humain depuis le 4 août. Mon fils, a-t-il précisé selon le communiqué de l’organisation de défense des droits de l’homme, souffre d’une grave maladie cardiaque et doit consulter un médecin. Ils ont refusé de le laisser suivre son traitement médical ».

Menace de mort

Ces derniers jours, l’Union africaine, l’Organisation des Nations unies, l’Union européenne et les Etats-Unis ont également exprimé leur inquiétude face à la dégradation du quotidien du président et de sa famille. « Rien ne permet de justifier un tel traitement », a dénoncé, vendredi, le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell.

Si la junte ne plie pas, Mohamed Bazoum pourrait-il se résoudre à démissionner ? « Non, non, ce n’est pas possible. S’il n’y a aucune solution, il finira en martyr », balaie Rhissa Ag Boula. « C’est un guerrier. Il ne lâchera jamais. Il préférerait mourir que démissionner », abonde le cadre anonyme, craignant que la vie du chef de l’Etat élu ne soit en danger en cas d’intervention militaire de la Cedeao. D’après une source française, les putschistes auraient en effet menacé de le tuer en cas d’opération.