The DIVI future theme ?

CONAKRY – Si les accords de non-double imposition entre la Guinée et plusieurs pays occidentaux, dont la France, sont censés créer un climat fiscal favorable aux échanges économiques, leur impact réel soulève des interrogations sur l’équilibre des bénéfices. Derrière des principes de coopération fiscale, se cache une réalité marquée par un rapport de force inégal entre pays partenaires.

Des accords pour protéger les investisseurs

Depuis plusieurs années, la Guinée a signé des conventions fiscales bilatérales avec des pays comme la France, le Maroc, la Belgique ou encore les Émirats arabes unis. L’objectif : éviter que les mêmes revenus soient taxés deux fois, à la source et dans le pays de résidence du bénéficiaire.

Ces accords visent à encourager les investissements étrangers, notamment dans des secteurs clés comme les mines, les télécommunications ou encore l’énergie. En retour, ils permettent à la Guinée de montrer un visage fiscal attractif et sécurisé pour les capitaux étrangers.

Mais dans la pratique, ces textes profitent-ils autant à la Guinée qu’à ses partenaires occidentaux ?

Un déséquilibre économique évident

Le déséquilibre est d’abord structurel : alors qu’on compte plusieurs dizaines d’entreprises françaises installées en Guinée – souvent dans des secteurs à haute valeur ajoutée – les entreprises guinéennes actives en France sont quasi inexistantes. À ce jour, peu d’acteurs économiques guinéens ont les capacités ou le réseau pour opérer durablement dans l’Hexagone.

Ce constat soulève une réalité économique : la France profite bien davantage de la convention fiscale que la Guinée. Les multinationales françaises implantées à Conakry peuvent, grâce à ces accords, optimiser leur fiscalité, rapatrier légalement une partie de leurs bénéfices, tout en bénéficiant d’un cadre réglementaire stable.

Moins de recettes pour l’État guinéen ?

En théorie, les conventions permettent d’éviter les doubles prélèvements, mais elles peuvent aussi réduire la base imposable de l’État guinéen. Certains revenus générés localement par des entreprises étrangères sont partiellement ou totalement imposés dans le pays d’origine, réduisant les recettes fiscales potentielles pour la Guinée.

De plus, faute de moyens techniques et humains suffisants dans l’administration fiscale, la Guinée peine encore à surveiller efficacement les flux financiers complexes, les prix de transfert ou les mécanismes d’optimisation utilisés par certaines multinationales.

 Exemple concret : la convention franco-guinéenne

La convention signée entre la France et la Guinée en 1999 (entrée en vigueur en 2004) est emblématique de cette dynamique. Elle encadre les modalités d’imposition des revenus tirés de l’activité économique entre les deux pays.

Mais dans les faits, ce sont principalement des entreprises françaises qui en bénéficient. Présentes dans les mines, la banque, les assurances, ou encore les infrastructures, ces firmes peuvent alléger leur charge fiscale grâce à des mécanismes légaux prévus par l’accord.

 Un appel à plus d’équité fiscale

Des économistes et fiscalistes locaux appellent aujourd’hui à renégocier certains accords, ou à mieux les encadrer pour protéger les intérêts guinéens. L’enjeu est double : garantir une fiscalité juste pour tous les opérateurs et préserver la souveraineté fiscale du pays.

L’État guinéen pourrait aussi investir davantage dans la formation des agents de la Direction Générale des Impôts, et dans des outils de surveillance des flux internationaux, afin de détecter plus efficacement les éventuelles pertes de recettes liées à des pratiques d’optimisation abusive.

Conclusion

Les accords de non-double imposition sont indispensables pour attirer les investisseurs et inscrire la Guinée dans les réseaux de l’économie mondiale. Mais leur application doit se faire dans un esprit de réciprocité. Pour l’heure, le déséquilibre entre le poids économique de la France en Guinée et l’inverse semble indiquer que ces conventions bénéficient davantage aux partenaires occidentaux.

Un rééquilibrage fiscal, basé sur une meilleure capacité de négociation et une administration modernisée, apparaît aujourd’hui comme une nécessité stratégique